Le chargé de mission du Club-Pyrénées-Ariège Investissement (Capi), en charge du lobbying ariégeois à Paris, répond aux accusations de l'ancien trésorier de la structure, Bruno Mégon.
Bruno Lavielle, visé directement par le rapport accablant de l'ancien trésorier du Club-Ariège-Pyrénées-Investissement, défend pied à pied son bilan et ses méthodes. Pour lui, l'audit réalisé par Bruno Mégon est « fantaisiste et mensonger », voire « diffamatoire ».
Votre sentiment sur l'audit réalisé par Bruno Mégon, qui parle de « factures non justifiées » et met gravement en cause le fonctionnement du Capi ?
Ce sont des propos mensongers et calomnieux, dirigés contre moi. Je fais l'objet d'une cabale, en raison de différends personnels, entre l'ancien président Frankel et moi-même. Il a pu se sentir tenu à l'écart. Bruno Mégon s'en sert.
Dans quel but ?
Je n'en sais rien. Je ne comprends pas son attitude.
Sur le bilan du Capi, confronté au scandale de Simbiosis, aux difficultés de Saint-Lizier et du Carla-Bayle, au naufrage des Soulades, quelle est votre analyse ?
Des choses concrètes ont été réalisées, à Guzet et à Saint-Lizier notamment. Il y a 700 lits locatifs à Guzet, il n'y avait rien. Saint-Lizier, c'était une ruine, nous avons un hôtel 3 étoiles, un investissement de 15 millions d'euros, et ça n'a rien coûté au Conseil général.
Vous ne regrettez pas d'avoir autant misé sur Alain Lapujade ? Ce n'était pas dangereux de tout confier au même investisseur ?
Je suis tombé sur un escroc. Mais l'Ariège, ce n'est pas la Riviéra. Ce sont les derniers de la classe qui viennent. Je n'avais que lui. Si Guzet, c'était Ax-les-Thermes, ce serait différent. Je me suis attaqué aux bébés malades.
Et vous avez eu un canard boiteux ?
Un canard boiteux, mais un canard vivant… Bien sûr, je ne suis pas fier de tout ce qui s'est passé. J'aurais aimé pouvoir triompher. Mais des choses ont été faites. On s'en rendra compte.
Sur les problèmes de facturation du Capi, dont fait état Bruno Mégon, que dites-vous ?
Toutes les factures sont justifiées. Il y a beaucoup d'approximations dans ce rapport, sur des factures de restaurant par exemple. Pour l'une d'elle, une soirée de réveillon, je n'étais dans le restaurant chic dont il parle, mais à Orléans, hospitalisé !
Et cette somme versée à une élue de l'Essonne, 20 000 €, pour une entrevue avec le ministre Borloo ?
D'abord, elle n'était plus élue, mais responsable d'un cabinet de communication. Et j'ai effectivement obtenu une entrevue avec le cabinet de Jean-Louis Borloo, au sujet de l'E9.
C'est une forme de lobbying assez particulière, non ?
Vous pensez que ça se passe comment, à Paris ? Le lobbying, c'est avant tout une question d'argent. C'était de la mise en relation. Et pour une telle prestation, ce n'était pas cher payé.
Et la somme versée par l'entreprise Colas, dont parle Michel Bégon dans son rapport ?
Là encore, c'était une forme de lobbying. J'attendais des retombées sur le dossier de l'E9. Colas m'aide et m'a aidé sur ce dossier.
Et cette fête, en 2009, lorsque vous avez reçu la Légion d'Honneur. Cent cinquante invités, et payée sur les fonds du Capi ?
D'abord, c'était aussi la fête du Capi, et tous les membres de l'association étaient invités. J'ai payé pour mes invités personnels. Et je peux vous fournir les chèques ! Les accusations de Michel Bégon sont fantaisistes, et infondées, à la limite de la diffamation.
Vous n'envisagez pas de déposer plainte ?
Non, par pour l'instant. Je veux avoir la paix. Mais le dossier est prêt, chez mon avocat.
Quelles sont, aujourd'hui, vos relations avec l'Ariège, et le président du conseil général, Augustin Bonrepaux ?
J'ai de bonnes relations avec Augustin Bonrepaux. Il m'a toujours défendu contre les accusations de Michel Bégon. Quand il a eu ce pport, il m'a demandé des explications, bien entendu. Je l'ai rencontré avec Alain Juillet, le nouveau président du Capi, qui l'a en grande partie rassuré. Par la suite, il y a eu le rapport de l'expert-comptable, qui confirme qu'aucune irrégularité n'a été commise dans la gestion du Capi.
A l'époque, septembre 2010, vous avez évoqué la question de ce rapport avec d'autres élus ariégeois ?
Non. Mon patron, de toute façon, c'était Augustin Bonrepaux. Je n'allais pas en parler avec les 21 conseillers généraux ariégeois.
Ni avec Jean-Noël Fondère, vice-président en charge des finances, qui explique avoir découvert ce rapport très récemment ?
Je n'en ai jamais parlé avec lui. On s'est vu une fois, peut-être. Mais sa réaction m'étonne en un peu. En tant que trésorier du département, il devait avoir les chiffres. Il pouvait poser des questions.
Comment Alain Juillet s'est-il retrouvé à la tête du Capi ?
Ca s'est fait lors de l'assemblée générale, lorsque Michel Bégon a présenté son rapport. Jean-Louis Frankel était absent, pour des raisons de santé. Alain Juillet a alors pris les commandes.
Il était démissionnaire ?
Tout a été fait dans les règles.
Il se dit qu'on ne vous voit plus au Capi. Où en êtes-vous aujourd'hui, de votre rôle au Club-Ariège-Pyrénées-Investissement ?
J'ai été obligé de prendre du recul, pour des raisons de santé. Mon médecin m'a « assigné à résidence » chez moi, dans le Loir-et-Cher. Mais je continue à assumer mes fonctions, sachant que je n'effectue plus qu'un tiers-temps depuis un an (1). Le Club continue ses cycles de conférence. Il fonctionne parfaitement.
Et ensuite ?
Je prends ma retraite à la fin de l'année. J'ai 68 ans. J'ai envie de prendre un peu de repos.
D'autres continuent plus tard !
Je ressens du dégoût. Ma fin d'activité, de toute façon, est prévue dans mon contrat. Le club est important, il doit continuer. Moi, j'ai fait mon temps.
Un ancien agent secret à la présidence du Capi
Voilà un parcours qui ne laisse personne indifférent, et une personnalité qui provoque même quelques critiques assez vertes dans le département : le nouveau président du Club-Ariège-Pyrénées-Investissement figurait voici peu parmi les effectifs de la DGSE. Alain Juillet a pris les rênes du Capi voici un an, alors que Michel Bégon venait de présenter son rapport au vitriol sur le fonctionnement de la structure (notre précédente édition). Les choses étaient menées façon commando : le président Jean-Louis Frankel démissionnait, Michel Bégon était privé de ses fonctions et Alain Juillet prenait la présidence de « la tête de pont de l'Ariège » à Paris. Or, cet homme, au parcours prestigieux dans le monde économique, est également un ancien des services secrets et membre influent de la Grande Loge Nationale de France, plutôt marquée à droite. Il est d'ailleurs souvent cité comme le « pilier » du comité des sages de l'Obédience, aujourd'hui dans l'œil de cylone, et placée sous administration judiciaire.
Une loge très particulière
Sur cette loge très particulière, où les membres prêtent serment sur la Bible, dont les femmes sont exclues et très isolée dans le monde de la franc-maçonnerie, beaucoup a été dit et écrit. Et notamment les avertissements de certains de ses membres, qui s'inquiétaient de la dérive affairiste de cette Loge puissante, forte de plusieurs milliers d'initiés. Ce mercredi, Augustin Bonrepaux, président du conseil général, a commenté la personnalité d'Alain Juillet en ces termes : « J'entends des critiques, ici ou là. Je pense que, pour la défense de l'Ariège et de ses intérêts, toutes les bonnes volontés sont bonnes à prendre ». Officieusement, on comptait beaucoup sur son carnet d'adresse pour vanter notre département.