
Jacques Tissinier : " Je suis traumatisé. "

Jugée dangereuse, la fontaine décapitée.
Le maire André Trigano est venu sur le chantier expliquer sa décision./Photo DDM, X. Olmos.
On connaissait la date de création, 1989, on connaît désormais la date de péremption et de destruction qui va avec : 29 juillet 2013. L’emblématique fontaine de la place de la République, dédiée au bicentenaire de la Révolution française, a tiré sa révérence lundi, en fin d’après-midi, avec pertes et moult fracas sous les coups de boutoir de la pelleteuse pilon du terrassier Latour. La fontaine monumentale appaméenne de l’artiste sculpteur Jacques Tissinier, créateur des Chevaliers cathares gardiens de nos diasporas bouchonnées sur l’A9 et chantés par Cabrel, plastronnait du haut de sa condescendance tellurique et pyramidale. Elle arborait non sans fierté le rose marbré ariégeois qui fit la magnificence du Grand Trianon de Versailles ! Érigée depuis 1989 en bonne place, la «Tissinierlisation 09» fit longtemps s’ouvrir les obturateurs cyclopéens des touristes «nikonisés» avant de se convertir en vulgaire skate park de jeunes effrontés qui n’ont que foutre de l’art contemporain.
Un art contemporain sursitaire et finalement voué à la décharge publique. Et c’est précisément au nom du sacro-saint principe de précaution et eu égard à la dangerosité que laissait planer «l’œuvre» au-dessus de nos chers enfants que le premier magistrat André Trigano a tranché. La sentence est tombée, lourde et brutale, comme la tête pyramidale décapitée en place publique lundi, à 16 heures, dans la benne de ce singulier convoi funèbre. «L’ensemble était dangereusement fragilisé. Il connaissait de sérieux problèmes d’étanchéité. Les plaques de marbre, saillantes, se descellaient et présentaient un danger évident et imminent pour le public et les enfants qui y faisaient du roller. Quand on est maire, on est obligé de prendre des décisions. Parfois dans l’urgence. En l’espèce, c’est la question de sécurité pour mes concitoyens qui a prévalu.» Et le maire de conclure : «S’il était arrivé un accident grave à quelqu’un, à un enfant, qu’aurait-on dit ? Que c’est la faute du maire !»
Un argument recevable, mais le point d’achoppement réside en la procédure. Une précipitation qui est contestée avec virulence par l’artiste Jacques Tissinier. (voir ci-dessous). Même position de l’opposant historique à André Trigano, le socialiste Michel Teychenné, qui ne manque pas une occasion de planter son burin contestataire dès que la municipalité lui en donne opportunément l’occasion (voir ses réactions par ailleurs).
Quoi qu’il en soit, la fontaine de la place de la République risque de faire couler beaucoup d’encre pour ce qui pourrait être «Le» feuilleton de l’été, sur fond de dangerosité sur le domaine public.
Et quelques regards se tournent déjà vers Notre-Dame-du-Camp.
À la stupéfaction générale, la fontaine de la place de la République est en voie de destruction depuis lundi. André Trigano parle d’une décision prise dans l’urgence, motivée par la dangerosité de l’ensemble. L’artiste Jacques Tissinier crie «au scandale».
Le chiffre : 1989
Année de l’inauguration de la fontaine dédiée au bicentenaire de la Révolution.
«Quand on est maire, on est obligé de prendre des décisions. C’est la question de sécurité qui a prévalu !»
Cette fontaine oeuvre de Jacques Tissinier, artiste de renommée internationale, était une des rares oeuvres d’art contemporain installées à Pamiers. Elle a souvent été reproduite dans des revues et livres d’art contemporain avant d’être saccagée par la mairie et transformé en bac...à fleurs.
Lauréat de la Fondation de la Vocation. 1982
Pensionnaire à la Casa de Velázquez de Madrid 1964
Logiste au Prix de Rome de Peinture. 1963
École nationale des Beaux Arts de Paris. 1962-1963
École des Arts Décoratifs de Paris. Atelier Marcel Gromaire, 1961
École des Beaux Arts de Toulouse. Licence d'histoire de l'Art.1957-1960
Principales expositions collectives
- exposition de la collection Prisunic, mobilier de plein air de 1972.
- « Artistes Artisans ». Musée des Arts décoratifs. 1975
- Biennale des Arts de la rue. Parvis de la Défense. Paris. 1978
- Biennales, Salons de mai, Salons de la jeune peinture, Salons des réalités nouvelles
Principales réalisations urbaines
- Les Abattoirs de Pamiers. 1968. Première œuvre murale signalétique en laque de /'industrie automobile.
- Les abris bus de Port Barcarès, en acier émaillé au four. 1969
- Mémorial à la Résistance. Aire de repos de Maillé, Autoroute A 10. 1976
- Place de la République de Pamiers, fontaine, 1989
- Les Mariaks de Mauléon Ou le rond point de l'Europe, inauguré par Jacques Delors. 1989
- « Les chevaliers Cathares ». Autoroute des deux mers, aire de repos de Narbonne. 1980
- Tissignalisation des Télécoms, Toulouse. 1991
- « Design miroir du siècle ». Grand Palais a Paris. 1993
- Réhabilitation chromatique des entrepôts SIKA. Le Bourget. 1995
- Mur anti-bruit sur le périmètre des usines SIKA. Le Bourget 1996
- Météor ligne 14, RATP. Tissignalisation des stations Pyramides et Madeleine. 1997
- Création des « crayons libertaires» sémaphores. CES Papus à Toulouse, 1972. CES Jean Moulin à Aubervilliers, 1973. Centre Pompidou, 1977. Pont neuf de Toulouse, 1983. Parc de la Villette, 1988. parvis du Centre Leclerc de Pau, 1989.
- Mission de conseiller artistique sur l'aménagement du parc de la Villette, les Folies, Paris. 1985
- Projet de l'Améridian Monument Valley, musée Sur la mémoire indienne. Arizona. 1980
- « Les affiches de mai », École des Beaux Arts de Paris. 1968
- Publication De la peinture à la signalétique. 1968
- Figure dans « L'histoire de l'art abstrait 1911-1987 », tome 5, dans le thème de l'Art dans la Cité, préfacé par Michel Seuphor, Marcelin Pleynet et Michel Ragon. Éditions Adrien Maeght 1988.